Passer au contenu principal

Le prix de l'autonomie


Personne n'est à l'abri de la maladie, d'une perte d'emploi, d'un divorce ou d'une séparation. Mais pour beaucoup de femmes, un tel chambardement entraîne bien souvent une précarité inimaginable jusque-là. La pauvreté habite la porte juste à côté.

Une histoire d'amour et de précarité
Un couple, hétérosexuel en l'occurrence, tombe en amour. Appelons-les Judith et Mario. Judith et Mario, donc, après quelques mois de passionnantes et enlevantes fréquentations, emménagent ensemble dans un joli condo flambant neuf sur deux étages, avec vue spectaculaire sur le Stade olympique. Wow, la totale.

Par la même occasion, ils achètent des meubles neufs, une nouvelle voiture, et font ensemble de superbes voyages. Bref, tout se passe merveilleusement bien, la vita e bella, un vrai conte de fées.

Deux années sonnant la relation, Judith découvre que Mario fréquente quelqu'un d'autre en cachette depuis des semaines (je vous épargne les détails), bref, l'histoire se corse (vous voyez le genre) et Judith, par respect pour elle-même, prend ses cliques pis ses claques et loue sur-le-champ un appartement, tandis que Mario, lui, chevauche entre l'appart de sa nouvelle amie et le condo neuf.

Somme toute banale cette histoire, non? Eh bien, pas d'un point de vue féministe, et ultimement, économique.

Le hic dans l'affaire est que Mario gagne 3.6 fois plus que Judith. Il ne ressent aucune urgence, lui, de vendre l'élégant condo - si ce n'est de régler le dossier avec l'ex au plus vite -, et désire la meilleure offre disponible sur le marché.

Mais Judith, elle, avec son plus modeste 32 000$ par année (avant impôts), doit péniblement continuer les versements hypothécaires dudit condo jusqu'à sa vente, en plus de payer le loyer de son petit 3 1/2 et quelques meubles pour le garnir humblement.

La qualité de vie - d'un point de vue strictement économique s'entend -, a drastiquement chuté pour Judith, qui doit maintenant dénicher d'autres sources de revenus au plus vite, entre autres, comme plongeuse dans un resto.

La vie est soudainement moins belle. Les paiements résidentiels, le coût de la vie en solo, le panier d'épicerie qui augmente sans cesse, sans parler de sa peine, du fardeau émotionnel et socio-affectif qui l'accable, bref, tout ça pèse lourd sur les épaules de Judith qui, de peine et de de misère, tente de maintenir la tête haute et surtout hors de l'eau.

Mario, lui, pendant ce temps, habite toujours le merveilleux condo en attendant le parfait preneur. Pas de stress. La nouvelle petite amie a finalement disparu du décor, et la joie de contempler la tour la plus inclinée au monde sans doute un peu aussi.

N'en demeure. Deux poids, deux réalités socio-économiques aux antipodes l'une de l'autre.

Messages les plus consultés de ce blogue

Mobilité vs mobilisation

On aime parler de mobilité depuis quelques années. Ce mot est sur toutes les lèvres. C’est le nouveau terme à la mode. Tout le monde désire être mobile, se mouvoir, se déplacer, dans son espace intime autant que possible, c’est-à-dire seul dans son char, ou encore dans sa bulle hermétique dans les transports collectifs, avec ses écouteurs sur la tête, sa tablette, son livre, son cell, des gadgets, alouette. On veut tous être mobile, être libre, parcourir le monde, voyager, se déplacer comme bon nous semble. On aime tellement l’idée de la mobilité depuis quelque temps, qu’on a même, à Montréal, la mairesse de la mobilité, Valérie Plante. On affectionne également les voitures, les annonces de chars, de gros camions Ford et les autres - vous savez, celles avec des voix masculines bien viriles en background - qui nous promettent de belles escapades hors de la ville, voire la liberté absolue, l’évasion somme toute, loin de nos prisons individuelles. Dans l’une de ces trop nombre

Je me souviens... de Ludmilla Chiriaeff

(photo: Harry Palmer) La compagnie de danse classique, les Grands Ballets canadiens, a été fondée par une femme exceptionnelle qui a grandement contribué à la culture québécoise, Ludmilla Chiriaeff (1924-1996), surnommée Madame. Rien de moins. Femme, immigrante, visionnaire Née en 1924 de parents russes à Riga, en Lettonie indépendante, Ludmilla Otsup-Grony quitte l’Allemagne en 1946 pour s’installer en Suisse, où elle fonde Les Ballets du Théâtre des Arts à Genève et épouse l’artiste Alexis Chiriaeff. En janvier 1952, enceinte de huit mois, elle s’installe à Montréal avec son mari et leurs deux enfants – elle en aura deux autres dans sa nouvelle patrie. Mère, danseuse, chorégraphe, enseignante, femme de tête et d’action, les deux pieds fermement ancrés dans cette terre d’accueil qu’elle adopte sur-le-champ, Ludmilla Chiriaeff est particulièrement déterminée à mettre en mouvement sa vision et développer par là même la danse professionnelle au Québec : « Elle portait en

Pour en finir avec Cendrillon

Il existe de nombreuses versions de « Cendrillon, ou, la Petite Pantoufle de verre », comme Aschenputtel,  ou encore « Chatte des cendres »... passons. Mais celle connue en Amérique, voire dans tous les pays américanisés, et donc édulcorée à la Walt Disney, est inspirée du conte de Charles Perrault (1628-1703), tradition orale jetée sur papier à la fin du 17 e  siècle. D'ores et déjà, ça commence mal. En 2015, les studios Walt Disney ont d'ailleurs repris leur grand succès du film d'animation de 1950, en présentant  Cinderella  en chair et en os, film fantastique (voire romantico-fantasmagorique) réalisé par Kenneth Branagh, avec l'excellente Cate Blanchett dans le rôle de la marâtre, Madame Trémaine ( "très" main , en anglais), généralement vêtue d'un vert incisif l'enveloppant d'une cruelle jalousie, Lily James, interprétant Ella (elle) dit Cendrillon (car Ella dort dans les cendres, d'où le mesquin surnom), Richard Madden, appelé Kit